Loi Blanquer Projet de loi « Pour une École de la confiance » Analyse de la CGT Éduc’action
Nous allons donc TRÈS VITE être concerné·es par ces nouvelles dispositions (rentrée 2019) : il y a URGENCE à faire entendre notre voix pour que cette loi ne soit pas votée.
Article 1 : les personnels soumis au silence « par leur engagement et leur exemplarité, les personnels de la communauté éducative contribuent à l’établissement du lien de confiance qui doit unir les élèves et leur famille au service public de l’éducation ».
Commentaire : En voulant compléter un article du code de l’Éducation, le ministre souhaite renforcer l’obéissance des personnels à l’égard de leur hiérarchie et ainsi les empêcher de critiquer la politique menée par les pouvoirs publics. C’est bien la volonté d’étendre le devoir de réserve à tous les corps de l’Éducation nationale afin de les réduire au silence. L’ordre et l’obéissance, ni plus ni moins.
Article 1er bis A et Article 1er bis B : salut aux drapeaux !
« La présence de l’emblème national de la République française, le drapeau tricolore, bleu, blanc, rouge, du drapeau européen ainsi que des paroles du refrain de l’hymne national est obligatoire dans chacune des salles de classe des établissements du premier et du second degrés, publics ou privés sous contrat. »
« La présence d’une carte de la France et de chacun de ses territoires d’outre-mer est obligatoire dans chacune des salles de classe des établissements du premier et du second degrés, publics ou privés sous contrat. »
Commentaire : Encore une injonction vide de sens, qui laisse supposer que les enseignant·es ne sont pas capables d’accompagner leurs élèves dans leurs apprentissages de la citoyenneté.
La meilleure façon d’y répondre serait d’avoir ces documents en format timbre poste dans un tiroir !
Articles 2, 3, 4 : Que va changer l’instruction obligatoire à 3 ans ?
Commentaire : Cette mesure, votée par les député·es, n’implique de changement que pour 2,5 % d’enfants en France Dans certains territoires d’outre-mer, moins de 70 % des élèves de cette classe d’âge étaient scolarisé·es (Guyane, Mayotte).
En présentant sa réforme, en mars 2018, le ministre de l’Éducation avait expliqué que, derrière ce chiffre de 97,5 % d’élèves de 3 ans scolarisé·es, se cachaient de fortes disparités géographiques, avec seulement 87 % de scolarisation en Corse, 93 % à Paris et parfois moins de 70 % dans certains territoires d’outre-mer.
Au-delà, cette mesure va obliger les collectivités à verser de l’argent aux écoles maternelles privées sous contrat. Un héritage de la loi Debré de 1959, dont nous exigeons l’abrogation : les municipalités sont tenues de participer dans les mêmes proportions aux frais de scolarité pour les enfants de leurs communes, qu’ils·elles soient dans des écoles publiques ou privées sous contrat. Jusqu’ici, cette obligation ne valait que pour les écoles élémentaires vu que l’instruction n’était obligatoire qu’à partir de 6 ans. Pour le comité national d’action laïque et la fédération des conseils des parents d’élèves, « avec cette mesure, le gouvernement signe un chèque de 150 millions pour les écoles privées [qui accueillent environ 300 000 enfants en maternelle], avec l’argent des collectivités locales. Si l’État s’est engagé à compenser les sommes engagées, cela ne sera réellement le cas que si la commune ne contribuait pas d’ores et déjà aux maternelles privées (c’est le cas des 2/3 d’entre elles). Les communes vont donc devoir trouver de l’argent et les économies se feront probablement sur le dos des écoles publiques.
Article 2 bis : inscription des élèves à l’école
Cet article donne la possibilité aux DASEN d’inscrire les élèves dans les écoles quand les mairies leur refusent ce droit.
Commentaire : C’est certainement une avancée. Nous ne devrons pas hésiter à le rappeler aux DASEN chaque fois que cela sera nécessaire. On pense bien évidemment aux élèves sans papier…
Articles 5 et 5 bis : contrôle de l’instruction à la maison
Commentaire : Cela donnera lieu à la création d’un poste d’IEN par académie pour effectuer ces contrôles. Ce n’est pas avec cette nouvelle mission que l’ensemble des IEN pourront sauver leur poste dans la nouvelle École du socle…
Articles 5 quinquies et suivants : l’École inclusive ou la mutualisation des AESH...
Commentaire : L’inclusion scolaire est introduite dans la loi par amendements ; l’une des mesures principales est la généralisation des Pôles Inclusifs d’Accompagnement Localisés (PIALs) : « sont créés dans chaque département. Ils ont pour objet principal la coordination des moyens d’accompagnement humain au sein des écoles et établissements scolaires de l’enseignement public et de l’enseignement privé sous contrat ». Il s’agit avant tout de rationaliser les effectifs et le temps de travail des AESH. Cela ne répond en rien au manque de personnel ou aux revendications CGT des AESH.
Article 6 section 3 bis : l’élite...
« Les établissements publics locaux d’enseignement international sont constitués de classes des 1er et 2nd degrés et dispensent tout au long de la scolarité des enseignements en langue française et en langue vivante étrangère »
Commentaire : Avec cet article ce sont les « lycées français » des expat’, Écoles de l’élite, qui s’implantent en métropole. Et on sait déjà quel en sera le public !
Article 6 Quater : Établissements publics locaux d’enseignement des savoirs fondamentaux « Les établissements publics locaux d’enseignement des savoirs fondamentaux sont constitués de classes du premier degré et du premier cycle du second degré. Ils associent les classes d’un collège et d’une ou plusieurs
écoles situées dans son secteur de recrutement. »
Commentaire : C’est L’ARTICLE qui entérine l’École du socle, la fin de l’organisation de l’École telle qu’on la connait, avec la possibilité de délocalisation de classes, avec la mise sous tutelle du premier degré par les collèges, avec la création d’un statut de chef·fe d’établissement chargé·e des classes du premier degré, exerçant sous l’autorité du·de la chef·fe d’établissement dans le collège, avec le renforcement des conseils école-collège, avec la disparition du conseil d’école remplacé par un conseil d’administration aux contours décisionnaire flous où seul·es des représentant·es élu·es à ces CA pourront siéger...
C’est l’outil idéal de la diminution des libertés pédagogiques et de la territorialisation du service public d’éducation.
Article 8 : Recours à l’expérimentation « peuvent concerner l’organisation pédagogique de la classe, de l’école ou de l’établissement, la liaison entre les
différents niveaux d’enseignement, la coopération avec les partenaires du système éducatif, les échanges avec des établissements étrangers d’enseignement scolaire, l’utilisation des outils et ressources numériques, la répartition des heures d’enseignement sur l’ensemble de l’année scolaire dans le respect des obligations réglementaires de service des enseignants, les procédures d’orientation des élèves et la participation des parents d’élèves à la vie de l’école ou de l’établissement”.
Commentaire :
Cet article est à rapprocher du précédent. Ces expérimentations donnent encore plus de pouvoir aux autorités académiques, détricotant de fait le caractère national de l’Éducation (modalité d’enseignement, répartition des volumes horaires pour les élèves, implantation accrue « d’agir pour l’école).
Et pour les évaluations, le principe étant désormais inscrit dans la loi, il n’y aura plus possibilité d’y déroger même quand celles -ci devront être passées pour chaque niveau voire plusieurs fois par an.
Article 9 : Conseil d ’ évaluation de l’École
« Le conseil d’évaluation de l’École, placé auprès du ministre chargé de l’Éducation nationale, est chargé d’évaluer en toute indépendance l’organisation et les résultats de l’enseignement scolaire. […] Il définit le cadre méthodologique et les outils des autoévaluations et des évaluations des établissements conduites par le ministère chargé de l’éducation nationale et analyse les résultats de ces évaluations. »
Commentaire : Toujours aussi dépendant du ministère de l’EN, ce conseil construit et impose les évaluations nationales obligatoires tant dans leur forme que dans leur passation.
Articles 10, 11 et 12 : les ESPE deviennent les INSPE, quelles différences ?
Commentaire : Dans la lignée de l’imposition d’une méthode de lecture, la mise en place de ces instituts nationaux supérieurs du professorat et de l’éducation se caractérise par la nomination directe des directeurs et directrices par le ministre et le recours à des formateur·trices du privé.
De plus, on sait que le contenu de formation en projet privilégiera les savoirs fondamentaux au détriment de la pédagogie et de la gestion de classe.
Article 13 bis : la visite médicale « Dans un délai de douze mois à compter de la publication de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur la généralisation de la visite médicale pour les personnels d’éducation tout au long de leur carrière et sur la faisabilité d’une telle mesure. »
Commentaire : Espérons qu’ils trouveront rapidement la faisabilité de cette mesure. Il y a URGENCE à prendre en compte la santé des personnels !!!
Article 14 : La préprofessionnalisation de certains AED
Commentaire : Les AED sont des personnels essentiels de la communauté éducative qui méritent mieux comme formation professionnelle que de prendre la responsabilité d’une classe en cas d’absence des enseignant·es. Avec cet article, c’est la possibilité d’obtenir une main d’œuvre de remplacement facile et pas chère...
Articles 17 et 18 : réforme territoriale par ordonnances
Commentaire : Ils prévoient que le gouvernement effectuera la réforme territoriale de l’Éducation nationale par voie d’ordonnances. Ainsi, il se donne carte blanche pour toute modification ou pour toute volonté de réorganisation de la carte scolaire ou du territoire. Ceci aurait des conséquences importantes pour le mouvement des enseignant·es ou la mise en place des EPLESF puisque ceux-ci se font à l’initiative conjointe des collectivités territoriales et du préfet.